janvier 20, 2021, category: Paradisme
Les contradictions du capitalisme énoncées par Marx peuvent-elles vraiment être les causes de sa disparition?
Pour Marx, la production sociale (une production par un grand nombre de travailleurs/producteurs interdépendants) entre les mains d'une petite élite privée qui possède les moyens de production (les capitalistes) est une contradiction majeure qui va mener à d'autres contradictions, à un système de classes, d'exploitation et de conflits sociaux, à des crises de plus en plus sévères et finalement à la disparition du capitalisme.
Le problème c'est que l'exploitation, les conflits sociaux, les crises, les guerres se sont succédés et le capitalisme est toujours là.
La question sur laquelle je vous inviterais ici à réfléchir est de savoir si les contradictions du capitalisme que Marx a mis en avant sont capables à elles seules de provoquer sa disparition?
Ou encore pourquoi le capitalisme n'a-t-il pas déjà disparu? Va-t-il disparaitre? Et qu'est-ce qui lui succedera?
Contradiction entre une production sociale et une propriété privée des moyens de production
La dissociation entre ceux qui fournissent le travail et ceux qui possèdent les moyens de production, l'autorité de décision et le fruit du travail, Marx appelle ça une contradiction.
Or ce n'est pas nécessairement une contradiction, c’est à dire quelque chose qui s’opposerait à sa propre existence. Nous allons dans un moment concevoir une société avec la même dissociation qui ne gènère pas sa propre destruction et qui pourrait être stable.
En fait, cette dissociation résulte d'une évolution naturelle de la production.
L'arrivée des machines qui nécessitent de travailler à plusieurs dans des taches très spécialisées, font que les ouvriers (à la différence des artisans) ne peuvent plus posséder individuellement les moyens de production, l'autorité de décision et la production.
Les ouvriers qu'on peut élargir à tous les employés, les opérateurs des machines et des structures complexes qui produisent les biens et les services, les travailleurs salariés que l’on appelle aussi le prolétariat, ne contribuent qu'à une partie limitée de la production finale. Ils ne peuvent en revendiquer individuellement la possession.
La dissociation producteurs/moyens de production qui met fin à l'artisanat, est une évolution naturelle liée à la complexification et à la socialisation du travail qui est nécessaire pour faire fonctionner les machines.
Nous allons voir que cette dissociation ne conduit pas nécessairement à des contradictions et des antagonismes autodestructeurs, et que l’explication de Marx sur l’origine des crises du capitalisme, n’est pas suffisante pour les comprendre.
Un système de classes antagoniste
La première conséquence de la dissociation entre travailleurs, les fournisseurs du travail, et capitalistes, les fournisseurs des moyens de production, c’est qu’effectivement cela crée un système de classes. Mais toute communauté qui subit une pénurie des biens et des services qu'elle produit, crée automatiquement un système de classes: une classe de possédants et une classe de démunis, le partage égalitaire d’une production insuffisante étant impossible. Un système sans classe n'est possible qu'avec une société d'abondance, comme ce fut le cas pour les sociétés originelles.
De plus, un tel système de classes n'est pas forcément un système conflictuel d'exploitation. Que les travailleurs vendent leurs heures de travail sans posséder les moyens de production et le fruit de leur travail, ce n'est pas un mal en soi. On peut imaginer un système où les gens sont libres de se mettre au service des autres sans être pour autant exploités. Nous nous mettons volontairement aux services de nos vieux, de nos jeunes, de nos malades et handicapés. Se mettre aux services des autres devient un mal que si nous sommes forcés de le faire. Par exemple, si l'on retire l'accès gratuit aux moyens de subsistance et que la population est forcée de travailler et de servir un patron pour gagner l'argent nécessaire pour survivre, alors cela devient effectivement de l'asservissement et de l'exploitation. Quels que soient les détenteurs les moyens de production, qu'ils soient privés ou publiques.
Tous les êtres vivants, et cela inclus bien sur tous les êtres humains, ont droit aux choses dont ils ont besoin pour survivre gratuitement. Ce droit naturel et universel n'est malheureusement plus respecté par les systèmes de société élaborées qu'on a mis en place.
Imaginons une société capitaliste où les êtres humains auraient un accès gratuit à tout ce dont ils ont besoin pour vivre décemment, et où le travail nécessaire pour faire fonctionner la société serait volontaire, même si motivé par des privilèges ou une vie plus luxueuse. Dans cette société, les travailleurs ne sont pas contraints de vendre leurs services à ceux qui en ont besoin et ne sont donc pas exploitables et exploités.
Le système de classes travailleurs/capitalistes n'est pas une raison suffisante pour être un système d'exploitation. Ce qui en fait un système d’exploitation, c’est de contraindre la population au travail en lui retirant son droit naturel à un accès gratuit à ses moyens de subsitance.
Et ce qui en fait un système d'exploitation conflictuel, c’est une autre contradiction enoncée par Marx conséquence de la première: les intérêts antagonistes entre la classe des travailleurs et celle des capitalistes. Pour maintenir ou augmenter leurs profits les capitalistes doivent exploiter toujours plus les travailleurs.
Pour continuer à rentabiliser leur capital et faire de la plus value tout en étant concurrentiels, les capitalistes doivent produire toujours plus et moins cher et la réduction nécessaire des couts de fabrication conduit inévitablement au development des moyens de production au depend de la masse salariale. L’accumulation et la suraccumulation du capital productif sont la cause et la consequence de la réduction de la masse salariale, et selon Marx sont à l'origine des instabilités et des crises systémiques du capitalisme et de son cycle économique. Les crises de surproduction et de destruction du capital productif qui surviennent de façons cycliques sont en fait des crises de sous-consommation qui résultent de l'exploitation du proletariat, les salariés.
L'origine des crises du capitalisme
L'exploitation du salariat et la sous-consommation qu'elle génère est-elle vraiment à l'origine des crises du capitalisme.
La réponse est non. Mais on n'est pas très loin de la vérité.
Pour le comprendre on va imaginer un système capitaliste qui exploite les travailleurs mais qui ne génère pas d'instabilité ou de crise.
Pour simplifier on va réduire la classe capitaliste à une seule personne qu'on va appeler Pharaon.
Je m’excuse auprès des égyptiens ou de certains érudits pour qui le Pharaon n’était pas un monarque exploiteur mais bienveillant et vénéré comme un Dieu. On verra plus tard pourquoi ils avaient peut-être de bonnes raisons de le penser.
Notre pharaon exploiteur imaginaire possède tous les moyens de production et tous les travailleurs travaillent pour lui et lui achètent tous les biens et les services dont ils ont besoin. La seule condition c'est que le pharaon doit dépenser tous les profits qu'il gagne dans la periode de renouvèlement de la consommation. Les consommateurs globalement renouvèlent regulièrement leur consommation, en général c’est de l’ordre de la semaine ou du mois. Pour simplifier nous dirons qu’ils renouvèlent leur consommation tous les jours. Le pharaon va donc dépenser dans la journée tout l’argent qu’il gagne pour par exemple se faire construire une pyramide.
On va supposer que les travailleurs ont tous initialement $100 pour acheter tout ce dont ils ont besoin pour la journée. Ils se lèvent le matin, font leurs courses et dépensent tous leurs $100 pour acheter au pharaon ce qu’il leur faut. Ensuite, ils vont travailler toute la matiné pour produire tous les biens et services qu'ils achèteront le lendemain.
Le pharaon qui est un capitaliste va les faire travailler pour $50 chacun pour faire un profit de $50 sur leurs achats. À la mi-journée les travailleurs ont $50 en poche et vont travailler l’après midi à la pyramide pour gagner $50 de plus. Ces $50 sont issus des profits que le pharaon a fait le matin et qu'il doit dépenser dans la journée. Donc à la fin de la journée, les travailleurs ont tous $100 en poche, la même somme qu’ils avaient en début de journée, et ils pourront acheter de nouveau tout ce dont ils auront besoin le lendemain. Il n'y aura pas de situation de crise.
Le pharaon peut exploiter les travailleurs et les faire travailler comme des boeufs, il peut diminuer leur salaire, les payer $10 pour produire toute la production et faire 90% de taux de profit au lieu de 50%. S'il dépense tout son argent dans la construction de sa pyramide, les travailleurs pourront toujours acheter tout ce dont ils ont besoin et il n'y aura pas de crise.
Ce sont les dépenses pharaoniques qui ont fait en sorte que la population ne manquait de rien et que tout le système prospérait. Cela pourrait expliquer la vénération de la population à leur pharaon.
Si on considère maintenant que le pharaon, c'est en fait un groupe de capitalistes, que la pyramide est des produits de luxe, on a un système capitaliste qui peut être extrêmement exploiteur mais qui ne connaît pas de crise. Comme dans le cas du pharaon, les dépenses des capitalistes dans les produits de luxe, le marché de la vanité, sont des facteurs de stabilité et de prospérité du système. Plus les capitalistes dépensent leur profits, plus ils stabilisent le système.
Cet exemple montre que ce n'est pas vraiment l'exploitation, l'appropriation du surtravail (le fruit du travail que le travailleur effectue après avoir fait celui nécessaire à payer son salaire) qui justifie les crises.
Le problème c'est quand les profits des capitalistes ne retournent pas entièrement aux travailleurs. Et c'est ce qui a échappé à Marx. C’est seulement si le pharaon ne dépense pas tous ses profits ou tarde à les dépenser que nous sommes dans une situation où les travailleurs n'ont plus suffisamment d'argent pour acheter leur consommation du lendemain, et que survient la sous-consommation, la surproduction et la crise.
Cette loi importante de l'économie devrait être écrite en grosse lettre dans tous les manuels. Elle peut s'énoncer comme ceci: pour que les échanges, le commerce entre 2 personnes ou entre 2 communautés s'opèrent de façon durable, ils doivent être équilibrés.
La classe prolétarienne est en commerce avec la classe capitaliste. L’une vend sa force de travail, l’autre sa production. Si la classe prolétarienne ne reçoit pas en retour tout l'argent qu'elle dépense auprès de la classe capitaliste, la classe prolétarienne s'appauvrit et le commerce entre les deux classes diminue. Si le commerce diminue, les salaires de la classe prolétarienne diminuent et c'est un cycle qui s'auto-amplifie et qui conduit à la crise.
C'est un problème de circulation de la monnaie.
Pour que le niveau de consommation soit stable, il faut que l’argent dépensé par un consommateur retourne au consommateur avant la fin du cycle de sa consommation.
Si le consommateur dépense plus qu’il ne gagne, pour maintenir le niveau de sa consommation il devra soit gagner plus ou emprunter à des amis, ce qui augmentera la vitesse de circulation, soit emprunter à la banque, ce qui augmentera la masse monétaire.
Il n’a que quatre choix possibles:
1) gagner plus en travaillant plus ou en se faisant payer plus. Ce qui est limité, difficile et globalement impossible d’étendre à tous les travailleurs dans une situation de surproduction.
2) gagner plus en se faisant aider:
- Il peut se faire aider par la classe prolétarienne (la famille, les amis). C’est aussi limité et ne fait que transfèrrer le problème à d’autres qui vont aussi dépenser plus qu’ils ne gagnent.
- Il peut se faire aider par la classe capitaliste. C’est la charité. Dans ce cas les profits capitalistes retournent bien aux travailleurs. Mais la charité capitaliste c’est aussi tres limité. Les capitalistes ont de biens meilleures options pour leur capital que de le donner à ceux qui en ont besoin.
- Il peut se faire aider par le gouvernement. Nous y reviendrons. Écartons pour l’instant cette possibilitè car c’est une forme de socialisation du capitalisme. Retenons seulement que l’état peut par des taxations sur les riches et les profits des entreprises, par des emprunts ou par de la creation monetaire, apporter des aides aux consommateurs, directement par de l’aide sociale ou indirectement en augmentant la masse salariale par l’augementation de ses dépenses.
3) emprunter: C’est possible mais malheureusement on ne prête qu’aux riches. Quand on est insolvable, sans capacité de rembourser ses dettes, les créditeurs sont introuvables. Ce n’est de toute façon pas une option durable.
4) diminuer sa consommation: Quand les options qui permettent au consommateur de maintenir sa consommation en augmentant la vitesse de circulation (gagner plus) ou la masse monétaire (le crédit banquaire) sont épuisées, le consommateur n’a pas d’autre choix que de diminuer sa consommation.
Le problème est que quand des consommateurs ne gagnent pas assez d’argent pour renouveler leur consommation, la circulation monétaire ne peut pas s’autoréguler par une augmentation de la masse monétaire (le crédit banquaire) ou une augmentation de la vitesse de circulation de la monnaie. Pour la simple raison que lorsqu’un consommateur n’a plus d’argent et qu’il ne peut en gagner plus, il ne peut ni emprunter aux banques, ni dépenser plus vite.
Quand la classe prolétarienne dépense plus qu’elle ne gagne, elle ne peut pas dépenser plus ou dépenser plus vite et la classe capitaliste ne va pas dépenser plus et plus vite non plus, au contraire. Quand les profits de la classe capitaliste ne retournent pas entièrement vers la classe prolétarienne au cours d’un cycle de consommation et quand les banques refusent d’aider celle-ci par le crédit (directement par des crédits à la consommation, ou indirectement par des crédits à l’investissement qui pemettrait aux consommateurs de travailler et gagner plus), sur le prochain cycle, la consommation de la classe prolétarienne va diminuer, les profits et la consommation capitalistes vont diminuer. Par conséquent la circulation monétaire va diminuer. C’est la recession économique.
L’origine des instabilités du capitalisme n’a rien à voir avec le surinvestissement, la surracumulation du capital productif qui crée la surproduction. C'est un problème mathématique simple.
Si au cours de son cycle de consommation, le travailleur ne gagne pas autant que ce qu'il a dépensé, et s’il ne peut pas gagner plus ou ne peut pas s’endetter, il doit réduire sa consommation. Appliqué à la classe des travailleurs, si les profits de la classe capitaliste ne retournent pas entierement à la classe prolétarienne, sans une augmentation du crédit à la consommation ou aux entreprises et sans aide du gouvernement, la consommation diminue. On a l'explication des crises de sous-consommation du capitalisme et du rôle joué par les banques pour générer les phases de récessions et de croissance du cycle économique ainsi que du rôle que peut jouer l’état pour soutenir la consommation. Quand les banques ouvrent le robinet des crédits, elles permettent la croissance. Quand les dettes s’accumulent et les risques d’insolvabilité deviennent trop grands, elles ferment le robinet et c’est la récession. Pour faire repartir la croissance les banques doivent refaire du crédit ou l’état doit augmenter ses dépenses pour relancer la consommation.
Dans une économie socialiste, il n’y a pas de cycle économique. Les profits des entreprises sont entièrement redistribués aux consommateurs par l’intermediaire de l’état. Toute la production est absorbée et les magasins sont vidés. La consommation n’est limitée que par la production.
Dans une économie capitaliste, la libre entreprise permet une abondance d’innovations et de choix mais la population ne peut pas se payer ce qu'elle peut produire. La consommation est limitée par le pouvoir d’achat. Les magasins sont toujours pleins et les vendeurs s'impatientent de voir rentrer des clients. La surproduction est une illusion. Si dans l’économie capitaliste les magasins sont pleins, c'est parce que les consommateurs sont pauvres.
La confusion ou ce qui échappe aux analyses de Marx
Ce qui a échappé aux analyses de Marx pour expliquer les crises du capitalisme et d’une façon générale qui échappe aussi aux autres analyses de la circulation monétaire qui sont enseignées, c’est l’impact du déséquilibre des échanges entre la classe prolétarienne et la classe capitaliste. Les échanges ne sont pas assez bien décrits pour pourvoir observer la véritable origine des crises.
Ce qui a créé de la confusion, a été de dire que de toute façon l’argent circule entre tous les consommateurs, qu’ils soient capitalistes ou prolétaires, et que si les capitalistes ne dépensent pas tout leurs profits, si une partie de l’argent est thésaurisée, c’est-à-dire mise dans un coffre et accumulée, ce n’est pas un problème pour les échanges car l’argent se met à circuler plus vite. Si la masse monétaire en circulation diminue, la vitesse de circulation augmente et compense la diminution. Que tous les montants des profits capitalistes ne reviennent pas à la classe prolétarienne n’est donc pas un problème.
Or on vient de voir que c’est justement le problème. Lorsque les travailleurs recoivent moins en salaire que ce qu’ils dépensent, ils ne peuvent dépenser plus ou plus vite. Ils doivent réduire leurs dèpenses. La vitesse de circulation ne peut pas augmenter, elle diminue.
Qu’une partie de l’argent ne circule plus et soit thésaurisé, cétait plus vrai du temps où la monnaie était indexée sur l'or et ne perdait pas de sa valeur avec l'inflation. Autrefois mais encore plus aujourd'hui, il est plus profitable de le prêter ou de le mettre à la banque et en retirer des intérêts.
L'argent que les capitalistes déposent dans les banques, c'est en fait de l'argent qu'ils prêtent aux banques et cet argent leur sert de réserves pour les prêts banquaires.
Mais surtout les capitalistes vont prêter au gouvernement qui est l'emprunteur le plus sur et qui offre des intérêts bien supérieurs aux banques. Le gouvernement a justement besoin d'argent pour aider les consommateurs et soutenir l'économie. Il va le dépenser sous forme d'aide sociale, de salaires des fonctionnaires, et toutes les autres dépenses de son budget (éducation, défense...).
Il y a un déséquilibre des échanges parce que la classe capitaliste ne depense pas tous ses profits, elle va les thésauriser mais surtout les prêter. Et c’est ce qui a ajouté à la confusion. Car tant que les profits des capitalistes retournent directement ou indirectement aux consommateurs sous forme de prêts (prets aux consommateurs, aux entreprises ou au governement), les consommateurs peuvent continuer de consommer et même consommer plus par l’effet multiplicateur des prêts banquaires permis par le système de reserves fractionnelles. Donc pendant toute la période de croissance où les banques prêtent à des taux d’interêt attractifs, les effets du déséquilibre des échanges ne sont pas observables. En fait, tout va pour le mieux. C’est pense-t-on le fonctionnement normal du capitalisme. Mais c’est en fait un schéma de Ponzi. Les consommateurs globalement continuent d’emprunter, leurs dettes s’accumulent sans jamais avoir la capacité de rembourser. Ils dépensent toujours plus qu’ils ne gagnent pour assurer les profits capitalistes. Le jour où les consommateurs et les entreprises deviennent insolvables, les banques réduisent les crédits, les profits capitalistes cessent d’être recyclés vers les consommateurs, les effets du déséquilibre se font sentir très brutalement, c’est la récession. Le fait que la période de récession est beaucoup plus courte que la celle de la croissance, fait penser à un comportement anormal du capitalisme et probablement corrigeable. Mais en cela Marx ne s’est pas trompé, Les crises du capitalisme sont bel et bien structurelles.
Mais le rôle de régulation du gouvernement et des banques dans la recirculation des profits capitalistes par l’endettement généralisé n'a pas été clairement mis en évidence et la véritable cause des crises capitalistes lui a échappé.
Pourtant c'est observable partout. Lorsque 2 personnes, 2 communautés, 2 pays sont en commerce et que le commerce est déséquilibré, arrive un certain moment l'un des partis n'a plus assez d'argent pour continuer à commercer. Il va demander à l'autre parti de lui faire crédit. C'est vrai pour la Grèce avec l'Allemagne, pour les États Unis avec la Chine... C’est vrai pour la classe prolétarienne avec la classe capitaliste. C'est vrai pour tous ceux qui sont en difficulté de paiement et qui veulent continuer à commercer.
Dans les périodes de croissance, les profits capitalistes reviennent aux consommateurs sous forme de prêts, des prêts directement aux consommateurs mais aussi des prêts aux entreprises et au gouvernement qui vont, lorsqu’ils sont dépensés, developper l’emploi et augmenter le pouvoir d’achat des travailleurs. Les profits capitalistes qui sont ni consommés ni investis, sont les causes de l’endettement et de l’insolvabilité structurels qui engendrent les crises. De plus, les capitalistes chargent des interêts sur leurs prêts, ce qui accentue aussi le déséquilibre des échanges et l’insolvabilité des consommateurs.
Le fait que le commerce de la classe prolétarienne soit déficitaire sert le système. L’endettement et la misère des consommateurs va assurer la perpétuité de leur travail et leur soumission. Ce sont les chaines qui les maintiennent au service de leurs maitres. Néanmoins ce déficite systémique crée aussi des instabilités.
Du temps de Marx le crédit était peut-être plus limité mais la thésaurisation produisait les mêmes effets que les variations du crédit. Lorsque les affaires commençaient à décliner, les capitalistes préféraient thésauriser plutôt qu'investir créant la sous-consommation. Lorsque les affaires reprenaient, ils se remettaient à investir et refaisaient circuler leurs profits vers les travailleurs.
Pour faire un jeu de mot, la thésaurisation n’a de toute façon pas d’interêt. Après un certain niveau d’accumulation qui guaranti la sécurité financière, il ne sert plus à rien d’accumuler. Une fois le niveau de sécurité atteint, l’accumulation de la fortune n’a d’interêt que le pouvoir qu’elle procure. Et c’est l’usure qui va donner à la fortune son pouvoir sur les autres, sur la société. Le riche dont la fortune lui donne déja toutes les gratifications possibles, va continuer son accumulation pour le pouvoir qu’elle va lui procurer. L’usure prend toujours le pas sur la thésaurisation. Parce que les dettes dans une économie sont beaucoup plus grandes que la masse monétaire, et à plus forte raison que les sommes effectivement thésaurisées qui n’en sont qu’une petite fraction, on peut considérer que la thésaurisation est un facteur très secondaire d’instabilité.
Ayant dis cela, on peut énnoncer la proposition suivante: la véritable origine des crises, c’est-à-dire de la misere accompagnée de la destruction des appareils productifs, ce n’est pas l’exploitation ou l’accumulation du capital productif, c’est l’usure.
Par usure, j'entends le fait de prêter de l'argent avec intérêt, qu’ils soient élevés ou faibles. Même un faible intérêt, lorsqu'il est cumulé, met le système en faillite. C'est comme une friction sur une roue qui tourne. Même un petit frottement l'arrête.
Le problème n'est pas de prêter de l'argent, c'est vraiment l'usure. Parce que c'est l'usure qui rend le prêt intéressant (jeu de mots). Sans intérêt, il n'y a aucun intérêt à prêter (encore un jeu de mots). Les riches préféreraient placer leur argent dans des choses qui conservent ou augmentent leur valeur au fil du temps sans prendre le risque de ne pas être remboursés. Comme l'art. Jusqu'à la Renaissance, les riches convertirent une grande partie de leur richesse en art et donnèrent du travail à de nombreux artistes et artisans. Cela a apporté la prospérité. Pensez à la pyramide et aux produits de luxe qui développaient l'économie..
Dès que l'activité de prêts avec intérêt s'est développée, les fantastiques créations artistiques ont cessé pour être remplacées par la création de dettes. Mieux vaut recycler les profits en rendant le monde plus beau que de faire des gens des esclaves de la dette.
Quand on comprend les effets de l’usure dans l’économie, on comprend qu’elle est à l’origine des plus grands malheurs qui ont affecté l’humanité. La misère, la servitude, l’injustice, les guerres…
Si avant la destruction de notre civilisation il y avait une recommendation à faire passer aux générations futures qui rebatiront la leur, ce serait d’interdire l’usure. Et c’est cette recommendation que nous ont transmis nos ancêtres. Nos grandes religions nous l’interdisaient. Enfin presque toutes les grandes religions. Les tribus humaines qui ne l’ont pas respectée se sont accaparées les richesses mais surtout le pouvoir au détriment des autres tribus qu’elles ont asservies. On aurait du écouter leur recommendation et chasser les marchants du temple, leur interdire d’exercer sur nous l’usure et non pas les laisser nous faire ce qui nous était interdit.
On peut se poser ici la question du pourquoi l’usure comme véritable cause des crises, a échappé aux analyses économiques qui nous sont proposées. Je crois que la réponse est que l’élite usurière nous l’a empèché. Son pouvoir sur l’information, la connaissance et l’éducation lui a permis de nous censurer et de nous illusionner en faisant porter notre attention sur des symptomes et en nous les faisant passer pour des causes. L’usure est la base de leur pouvoir. Elle est complètement integrée au fonctionnement du capitalisme. Elle ne peut pas être remis en question sans remettre en question tout son système monétaire. Alors bien sur on ne va jamais en connaitre les effets perverts dans les media et dans nos universités qu’ils prennent grand soin de tous contrôler. En écrivant ces lignes je prends conscience qu’elles seront censurées, ridiculisées, attaquées. C’est peut-être le plus grand tabou ou le plus grand secret que l’élite doit à tout prix préserver. Parce que c’est une vérité qui à elle seule peut faire tomber l’illusion, les chaines invisibles qui nous maintiennent en servitude.
L’origine du cycle long des dépressions
Il y a un autre cycle beaucoup plus long et beaucoup plus sévère, c'est le cycle lié à l'endettement du gouvernement. Pour faire recirculer leurs profits et soutenir la consommation (équilibrer les échanges entre les classes prolétaire et capitaliste), le gouvernement emprunte auprès des capitalistes et en dépensant, l’argent retournent directement ou indirectement aux travailleurs/consommateurs. Lorsque le jour arrive où les capitalistes réalisent que le gouvernement ne sera plus capable d'assurer les remboursements et les intérêts, ils hésitent à prêter, augmentent leurs interêts, forcent le gouvernement à privatiser ses biens (aéroports, transports, prisons, santé...), tout ce qui est privatisable. Et le jour vient où l'état doit déclarer la banqueroute. C'est la grande crise, la dépression, l'effondrement. C'est le grand reset. Qui peut être suivi par une guerre, une destruction inouïe. On fait table rase pour pouvoir recommencer un nouveau cycle de croissance.
Pour une description plus complète de la circulation monétaire et pour mieux comprendre les dysfonctionements du capitalisme, je vous recommende de voir la vidéo “De l’effondrement au paradis”: https://youtu.be/ZleJ9jUcAUs?list=PLKSc3gdwl111fDPwqYQShdBV-MxC6VbIi
La contradiction de la suraccumulation
La contradiction de la suraccumulation du capital comme un facteur des crises est révélatrice de la confusion de Marx. Pour Marx, les capitalistes dépensent leurs profits en consommant et en investissant pour augmenter leur capital productif. Les prêts et la thésaurisation qui sont moins profitables que les investissements productifs, devraient être comparativement en proportions négligeables et lui ont échappé comme étant très importants. Observant les crises de surproduction du capitalisme, il en a déduit que c’est plutot la suraccumulation du capital productif qui devait être un facteur important. On a vu avec l'exemple du pharaon qu'il n'en est rien. Le pharaon, au lieu de se construire sa pyramide, peut ajouter des machines à volonté à son capital productif, tant que tous les profits retournent d'une manière ou d'une autre aux travailleurs, il ne se crée pas de situation de crise.
La contradiction de la baisse tendancielle du taux de profit
Le taux de profit des capitalistes est le profit ou la plus value qu'ils dégagent par rapport aux sommes qu'ils investissent. Il est étroitement corrélé au cycle économique. Il croit dans les périodes de croissance et décroît dans les périodes de récession.
Pour Marx, la raison majeure pour laquelle les crises du capitalisme vont finalement conduire à son effondrement et à l'avènement du communisme, est que le taux de profit des capitalistes est condamné à la baisse. À long terme, leurs investissements rapporteront de moins en moins de profit. Les masses prolétaires devront être de plus en plus exploitées et finiront par se révolter.
La baisse tendancielle du taux de profit est ce qui cristallise toutes les contradictions du capitalisme (production sociale et appropriation privée, l’antagonisme des classes, la suraccumulation du capital, valeur réelle et valeur d’échange de la production...) et qui va le mener à sa fin.
C’est pour Marx la cause majeure de la disparition inévitable du capitalisme.
D'abord est-il vrai que le taux de profit est condamné à baisser sur le long terme?
On l'observe c'est vrai au niveau d'un marché. Par exemple le marché des télévisions.
Lorsqu'une nouvelle technologie crée un nouveau marché ou change les rapports de forces, les taux de profits peuvent être élevés. Mais à moyen où long terme lorsque la concurrence s'est installée ou a rattrapé son retard, le taux de profit diminue. Par exemple l'industrie métallurgique, de l’automobile, des télévisions. Les industries sont moins profitables qu'à leurs débuts. La technologie plafonne, les avantages concurrentiels se sont dissipés, les marchés saturent, rendant les investissements beaucoup moins rentables.
Oui à long terme le taux de profit d'un marché baisse mais le marché ne disparaît pas complètement. Le marché des machines à laver existe toujours mais il n'y a plus beaucoup de place pour faire des profits élevés. Le marché trouve un équilibre au minimum de profit nécessaire à sa survie mais il ne disparaît pas. Et les travailleurs des entreprises qui fabriquent les machines à laver ne sont pas plus exploités que les autres et ne se révoltent pas.
Il est difficile de mesurer le taux de profit globale des entreprises d'une économie d’un pays, mais globalement, on observe que le taux de profit semble se porter toujours très bien. Les capitalistes se gavent à des niveaux records. Les milliardaires apparaissent beaucoup plus vite et en plus grand nombre. Les raisons sont nombreuses. La principale est surement le taux accéléré d'apparition des nouveaux marchés qui génèrent des profits énormes dans un marché maintenant globalisé. Les capitalistes sont les grands gagnants des avancées technologiques qui suivent une courbe exponentielle. Plus on progresse et plus on progresse vite et plus vite les capitalistes peuvent s'enrichir.
Une autre raison est que le capitalisme s'adapte. Il se crée des défenses pour sa survie. Pour préserver des taux de profit élevés, il va élargir les marchés (impérialisme, globalisme), développer la consommation (le marketing, les modes, les marques, l'obsolescence programmée), protéger les profits (le copyright, les licences, créer des monopolies et des cartels) et bien sûr les vieilles recettes, s'il le faut il détruira le capital productif pour refaire de la croissance (les recessions, les crises, les guerres).
Pour se protéger des révoltes, il va prendre des mesures sociales (salaire minimum, indemnités de chômage, sécurité sociale, retraites), endoctriner et contrôler la population (propagande médiatique, surveillance, mesures sécuritaires, opposition contrôlée, censure) et la soumettre en lui créant des peurs (ennemis ou dangers imaginaires, terrorisme, changement climatique, pandémie).
À la question de savoir si le capitalisme peut survivre à ses contradictions la réponse est apparemment oui.
Pourquoi le capitalisme n'a-t-il pas disparu?
Parce qu'il peut s'adapter et s'accommoder des instabilités qu'il crée et rebondir de ses crises.
Les capitalistes ont besoin de faire de la croissance pour générer les profits qui les nourrissent. Or un système où une classe parasitaire exploite l'autre ne peut croitre indéfiniment. Les crises sont nécessaires pour se débarrasser du surcroit de parasites (les capitalistes les plus faibles) afin de ne pas tuer l'hôte qui les nourrit. Les grands capitalistes internationaux qui contrôlent le crédit, donc les périodes de récession et de croissances du cycle économique, sont aussi ceux qui financent les deux cotés des guerres. Ils sont en contrôle de la croissance et de la destruction du capital et peuvent s'assurer que le système peut renaitre de ses cendres et se réinitialiser.
Le capitalisme va-t-il disparaitre?
La réponse est oui. Il vit même ses dernières années.
Il va disparaitre de 2 façons possibles.
La première par la destruction de la vie sur la terre. Une autodestruction par la guerre atomique ou par la destruction de l'écosystème. Le capitalisme victime de son succès, ne peut plus contrôler le fruit et la source de sa croissance, la densité de la population, et se devore pour les dernières ressources. La surpopulation sera la cause de la dernière guerre et la destruction de l'écosystème.
La deuxième par un changement du mode de production. Si nous surmontons les dangers de la surpopulation, la guerre atomique et la destruction de l'écosystème, alors le capitalisme disparaîtra comme il est apparu, par l'arrivée d'une machine: la machine intelligente.
La machine a créé les capitalistes et le prolétariat, la machine intelligente les fera disparaître. La machine intelligente détruit le salariat et donc la consommation et la production capitaliste. Il n'y a pas d'échappatoire.
Ce sont les modes de production qui amènent les changements systémiques. À chaque nouveau mode de production (chasseur-cueilleur, agraire, industrielle) un nouveau système de société et une nouvelle élite vont s'imposer. Un nouveau mode de production amène une nouvelle élite au pouvoir qui va établir le système qui optimise ses privilèges et sa survie.
Pour mieux comprendre, je vous recommande de regarder la vidéo suivante "la révolution systémique en cours": https://youtu.be/_ZzhmVQj90Y?list=PLKSc3gdwl111fDPwqYQShdBV-MxC6VbIi
La libre entreprise s’est montré être le moteur plus puissant d'innovations et la planification d'une économie collectiviste s'est avérée trop complexe pour être plus efficace que le libre marché.
Les capitalistes nous préparent leur grand reset, leur nouvelle réinitialisation, avec de nouvelles adaptations pour remédier aux pertes massives d'emplois comme celle du revenu universel. Pour ceux nombreux qui croient que le revenu universel peut sauver le capitalisme je vous invite à voir la vidéo: https://youtu.be/Mo10QDE9syI?list=PLKSc3gdwl111fDPwqYQShdBV-MxC6VbIi
Tous les éléments sont en train de se mettre en place pour l'émergence d'un nouveau système de société. Ce qui se prépare réellement ce n'est pas un grand reset du capitalisme mais un grand débarra. Le grand débarra du capitalisme.
Que va-t-il succéder au capitalisme?
Lorsque les machines intelligentes auront remplacé les travailleurs, il n'y aura plus de travail et donc plus besoin d'argent. Les robots vont produire gratuitement tous ce dont on a besoin et une intelligence artificielle administrera les ressources, la production et la distribution des produits et des services. Elle sera programmée pour nous être complètement dévouée et pour subvenir à tous nos besoins et nos desires.
Cette société où tous les hommes sont libres et s'épanouissent en faisant uniquement ce qui leur fait plaisir, c'est ce qu'on appelle un paradis. Et le type de société d'un paradis, on peut appeler ça le paradisme.
Le paradisme ressemble à s'y méprendre à la destination finale du communisme. Comme le communisme que l'on qualifie parfois ironiquement d'utopique, le paradisme est une société collectiviste sans travail ni argent où tous les moyens de production sont possèdés par l'ensemble de la collectivité.
Ce qui différencie le paradisme du communisme utopique, c'est la dictature du prolétariat. Les communistes pensent que le proletariat doit assurer collectivement le contrôle de leurs usines et de leur lieu de travail, les moyens de production. Le paradisme se met en place en opérant la disparition du proletariat. Les deux systèmes sont des systèmes collectivistes avec des destinations similaires mais des chemins différents.
Les révolutionnaires communistes vont descendre dans la rue au cri de "travailleurs unissons-nous" et vont oeuvrer pour préserver la classe prolétaire qui est la base sur laquelle il fonde leur future société. Les révolutionnaires paradistes oeuvrent pour mettre fin au proletariat au cri de "plus de travail, plus de liberté". Ce qui en français peut prêter à confusion à la lecture et doit se comprendre comme "supprimer le travail et libérer les travailleurs".
Les communistes qui ne prendront pas le chemin du paradisme risquent de se retrouver du mauvais côté de l'histoire et de la révolution systémique en cours. Ils seront des freins à la société paradisiaque qui se met en place. Et c'est regrettable car les forces révolutionnaires communistes avec leur organisation et leur dimension internationale pourraient faire énormément pour unir les révolutionnaires de tous les pays dans l’établissement du paradisme.
Si le communisme n'a pas triomphé, c'est parce qu'il est apparu trop tot. L'intelligence artificielle, Big data, la technologie qui permet la planification à toutes les échelles, n'était pas encore arrivée.
Le collectivisme est le système le plus adapté aux sociétés d'abondance comme en témoignent les sociétés originelles. Partant de la société d'abondance et du collectivisme primitif, le capitalisme a été parmi les systèmes transitoires celui qui nous a permis une croissance accélérée pour accéder le plus rapidement à la société d'abondance et au collectivisme technologiquement développé. Un parcours qui a été parsemé des crimes et des injustices les plus horribles dont on se serait bien passé. Le capitalisme a néanmoins rempli sa mission. Il peut maintenant disparaitre.
Donc au bout du compte, Marx avait raison. Le collectivisme triomphera du capitalisme. Il s'est peut-être trompé sur les véritables causes de sa disparition mais pas de beaucoup.
Auteur: Jarel
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